L’UDPS et le Destin du Congo
Par Joël Asher Lévy-Cohen
Les dates renferment, généralement, une valeur symbolique dans la vie d’un pays qui veut se construire un destin. Il en est ainsi du jeudi 30 juin 1960 pour la fameuse République démocratique du Congo qui joue, de nos jours, pleinement sa survie en tant qu’entité politique et Collectivité publique au cœur du continent africain. Celle-ci lui a, naturellement, permis de s’inscrire en tant qu’État souverain et indépendant sur la mappemonde interétatique.
Toutefois, il est effectivement une date que d’aucuns ne pourraient ignorer en raison de son imposante charge politique. En fait, celle-ci ne peut être ignorée en raison de sa place éminente dans la trame historique des événements doublement décisifs au destin national et à l’affirmation de la Souveraineté populaire. Cette date est, certes, le 15 février 1982. Elle présente pratiquement une valeur idéologique très puissante en ce qui a normalement trait au type de relations politiques que sont censées tisser les institutions publiques du pays avec les Citoyens.
En effet, la date du 15 février 1982 a, naturellement, permis au Peuple martyr de la République démocratique du Congo, sans doute ‘‘ignoré’’ et ‘‘écrasé’’ comme un ver de terre par ses propres dirigeants politiques, administratifs et gouvernementaux, d’être inscrit en lettres d’or et de feu sur la carte politique du pays. Chose certaine, depuis le coup d’État militaire du 24 novembre 1965, le Peuple congolais n’existait, en vérité, pratiquement plus. Ce phénomène sociopolitique de bâillonnement de la voix du Peuple, d’écrasement de sa souveraineté politique s’est, d’abord, accentué avec l’institutionnalisation du Mouvement populaire de la révolution (MPR) en tant que ‘‘parti unique’’ en octobre 1971. Il s’est, ensuite, amplifié avec la transformation de cette entité en Parti-État en 1974. Dans ce système despotique et monopartite, seul existait, en principe, le président-fondateur du MPR en qualité d’homme-organe sous le couvert de cette entreprise ‘‘atypique’’ et ‘‘inique’’.
Donc, seul existait, vraiment, Mobutu Sese Seko du Zaïre. Lui seul avait, en réalité, la parole. C’est-à-dire : ‘‘le pouvoir de critiquer les Institutions et leurs animateurs ’’. Cet exercice impliquait, bien entendu, la faculté de les abolir et de les remanier selon ses phantasmes despotiques et son délire narcissique. À vrai dire, seul détenait dans ce pays l’imperium, donc le pouvoir politique, le ‘‘dictateur’’ Mobutu. Ce qui signifiait le pouvoir de vie et de mort sur l’ensemble de la société, et ce à l’image d’un pater familias. C’est-à-dire : un patriarche à la tête d’une communauté, un roitelet à la tête d’une chefferie traditionnelle. En d’autres termes, la personne du Maréchal Mobutu Sese Seko du Zaïre avait ‘‘doublement’’ qualité de pouvoir politique et d’Institution publique (organe d’État).
Cependant, la naissance politique de l’UDPS en date du 15 février 1982 marque, en réalité, la résurrection du Peuple congolais, d’ailleurs, substitué à cette ère trouble par le Parti-État ou parti unique qu’est sans nul doute le MPR sur le terrain national. En vérité, la fondation de cette formation pro-démocratique marque ipso facto la reconnaissance indéniable, irréversible, du Peuple en tant qu’entité politique viable disposant des ‘‘droits fondamentaux’’ au premier rang desquels la parole.[ii] Donc, la création de cette organisation partisane marque la reconnaissance du Peuple en tant que ‘‘groupe politique’’ et ‘‘entité souveraine’’ qui se réapproprie définitivement son destin national par le phénomène sociopolitique du libre choix. En d’autres termes, cette date très hautement ‘‘symbolique’’ du 15 février 1982 veut dire politiquement « Souveraineté » et idéologiquement « Liberté » du Peuple.
Dans le contexte de naissance politique de l’UDPS, la Souveraineté populaire signifie que ‘‘le pouvoir politique appartient au Peuple’’. Ainsi, ce dernier est le seul titulaire du pouvoir dans la société. La liberté est la faculté lui reconnue de désigner sans contrainte physique et morale ses propres dirigeants, d’ailleurs sensés incarner ses aspirations légitimes, par le truchement de la compétition électorale. C’est aussi la faculté lui reconnue de se choisir sans entrave son parti, sensé le représenter, tout comme promouvoir ses idées, par le biais de la concurrence politique et idéologique.
Toutefois, que signifie-t-elle exactement la naissance de l’UDPS dans le contexte de tyrannie ‘‘politique’’ et ‘‘militaire’’ directement issue des pourparlers intercongolais de ‘‘Pretoria’’ de 2002 et de ‘‘Sun City’’ et 2003 ? Que signifie-t-elle véritablement la fondation de cette organisation politique dans le contexte d’une dictature à la solde des puissances étrangères et des intérêts maffieux ? Que signifie-t-elle réellement cette création dans le contexte d’un régime liberticide et démocraticide dont la seule et unique volonté politique est d’égorger la Souveraineté du Peuple et, par voie de conséquence, détruire tout le fondement de la Nation ou démanteler les fondations de l’État républicain ?
Face à un despotisme des plus cruel et des plus aliénant, à un régime destructeur de l’humain dans ses dimensions morales et spirituelles, matérielles et intellectuelles, face à un pouvoir sanguinaire et macabre réputé réduire à néant l’humanité, l’UDPS incarne, par essence, la résistance politique. À cet égard, résister veut dire, en vérité, réhabiliter l’Être humain dans ses droits fondamentaux, donc ses droits inaliénables et sacrés. Résister veut dire restaurer la dignité humaine indubitablement niée par le système répressif et arbitrairement emprisonnée par le Mal oppresseur.
Dans un contexte tyrannique, ‘‘résister’’ signifie restaurer tous azimuts la liberté, la démocratie et la justice. La liberté est, par définition, l’Indépendance du Peuple. La démocratie se veut en réalité le pouvoir légitime de la Nation. Quant à elle, la justice est l’assise de la paix et de la sécurité, deux conditions essentielles pour promouvoir et par conséquent amorcer la marche libératrice vers le développement économique et le progrès social de la Collectivité publique. Tels sont en fait les défis auxquels est confrontée l’UDPS dans sa marche pour la conquête pacifique du pouvoir politique. Tels sont effectivement les paris que cette formation politique se doit, en principe, de relever en vue de garantir solidement l’avenir de la République démocratique du Congo.
Face à un État manifestement déliquescent ou un pays certes manqué, la date du 15 février 1982 veut dire, incontestablement, le changement politique et démocratique. Par conséquent, le vrai changement signifie effectivement l’abandon de la culture de corruption, de concussion et de prévarication. C’est l’éradication de l’immoralité ou de l’amoralité qui gangrène malheureusement la moelle épinière de la Nation. C’est, sans autre forme de procès, le rejet systématique et automatique des antivaleurs.
Il s’agit, en d’autres termes, de l’instauration d’une nouvelle culture politique. Celle-ci doit être substantiellement fondée sur la ‘‘Vérité’’ et la ‘‘Transparence’’. Elle doit, donc, s’arc-bouter sur la ‘‘Bonne gouvernance’’ politique et administrative.
Dans le contexte de la crise politique malheureusement issue de la non-application de l’accord de la saint-Sylvestre - (arrangement conclu après moult rebondissements le 31 décembre 2016 par les entreprises politiques et les acteurs de la société civile) - par la mouvance de Joseph Kabila Kabange, le vrai changement signifie, en principe, le respect scrupuleux de la parole donnée et de sa signature. Il signifie la ferme volonté d’engagement politique en vue d’éliminer tous les germes d’un conflit préjudiciable aux intérêts sacrosaints de la Collectivité publique. C’est, à proprement parler, l’instauration de la culture des textes dans le but de sauvegarder les intérêts vitaux du sanctuaire national.
Par voie de conséquence, la fondation de l’UDPS postule, en réalité, la modernisation de l’idéologie de l’État et de l’ensemble de l’appareil politique. Aussi postule-t-elle la modernisation tous azimuts des pratiques politiques et administratives, ainsi que la moralisation de la sphère publique.
Face à une Collectivité publique culturellement et économiquement déstructurée, en voie de démembrement et de disparition (balkanisation), la date du 15 février 1982 inspire des réflexes patriotiques pour sauver la Nation. Face à un Peuple en danger, au bord de l’explosion sociale, miné par des crises cycliques et, surtout, plombé par des rivalités politiques fratricides, elle inspire éminemment l’esprit de solidarité. Et la solidarité signifie intrinsèquement l’esprit d’union, l’harmonie collective. C’est cet esprit d’unité qui fermente fortement la conscience nationale et forge le patriotisme.
Dans la perspective et l’optique du Congrès extraordinaire de l’UDPS, qualifié à juste titre de Congrès du Peuple congolais, la date du 15 février 1982 est matériellement la démonstration de son existence. C’est en réalité la preuve de son refus de mourir gratuitement ou naïvement. C’est la preuve irréfutable de son refus d’être écrasé par les forces rétrogrades ou les puissances réactionnaires.
C’est, en réalité, le refus d’être prisonnier de l’oppression politique, administrative et gouvernementale. C’est, en fait, le refus permanent d’être forçat de la tyrannie néocolonialiste et esclave de l’État valet des puissances économiques et financières. C’est le refus d’être chiourme du système d’Apartheid économique international et esclave du néolibéralisme négrier. C’est, à n’en point douter, la preuve vivante que le Peuple congolais a, manifestement, conquis de très haute lutte le droit à la parole que bon nombre de puissances ténébreuses tentent par tous les artifices de ravir à jamais. C’est naturellement la preuve vivante que ce Peuple est foncièrement libre et complètement debout, qu’il est indéniablement le seul Maître du pouvoir politique en République démocratique du Congo devenue otage des forces maffieuses.
À vrai dire, la date du 15 février 1982 signifie, très pertinemment, la conquête de la citoyenneté démocratique par le Peuple totalement asservi par l’ordre dictatorial en tant que sous-produit du colonialisme et phantasme de l’impérialisme. C’est, en fait, le jour où l’ensemble des Congolaises et Congolais sont devenus à part entière de véritables Citoyens. Cela implique logiquement et forcément que ceux-ci disposent dorénavant des droits fondamentaux. Cela implique qu’ils jouissent réellement des libertés publiques reconnues et enchâssées dans la loi fondamentale. En vertu du combat politique et démocratique, la date du 15 février 1982 signifie la lutte contre les inégalités sous toutes ses formes. Donc, c’est le combat pour la justice sociale.
Par ailleurs, dans la perspective de conquête pacifique du pouvoir politique dans cet État d’Afrique centrale et de la région des Grands Lacs africains, cette date majeure signifie essentiellement « unité » et « discipline ». En réalité, Unité veut dire Union ‘‘étroite’’ avec le Peuple congolais. Celle-ci n’est évidemment possible que lorsque l’on partage ses véritables aspirations légitimes. Elle veut dire convergence des vues dans le cadre du changement politique et du combat démocratique.
La discipline signifie, en principe, la rigueur dans la conquête du pouvoir politique. C’est la lucidité qui permet de garder littéralement le cap sur la lutte de libération nationale et de ne pas diverger sur les objectifs à atteindre. En d’autres termes, la discipline se veut le socle de l’unité sur laquelle s’enracine l’harmonie, se fonde la convergence et se fortifie la Conscience. Par conséquent, il appartient à tous les cadres, militants et sympathisants de l’UDPS de former ensemble, et autour de leur candidat, un seul et même esprit, un seul et même corps.
Ainsi revient-il aux membres de l’UDPS, aguerris par 36 ans de lutte politique féroce, de se souder très fermement autour de son leader et derrière le Parti du Peuple afin de former avec lui ce que les Adeptes de la sagesse arcane désignent un « Égrégore » dans la tradition mystique et la connaissance transcendantale. C’est manifestement incarner un même Esprit, une même Âme et une même Puissante Énergie. C’est en principe former une même entité à la fois visible et invisible. ‘‘L’Union fait la force ! ’’, dit-on.
L’Union veut dire aussi reconstituer la grande famille de l’UDPS. C’est faire renaître de ses cendres l’UDPS historique. C’est ressusciter l’UDPS des Pères fondateurs dont la finalité était, à vrai dire, le salut de la République démocratique du Congo, dont le principal objectif était la justice distributive pour son Peuple martyr.
À bon entendeur salut !
Joël Asher Lévy-Cohen
Journaliste indépendant