L’OUH au service des déshérités
De l’art d’aider Haïti
Quand l’humanitaire est une véritable vocation sacerdotale
‘‘Il ne faut jamais attendre une minute pour commencer à changer le monde’’ Anne Frank
Par Joël Asher Lévy-Cohen *
L’Organisation de l’Union haïtienne (OUH) est légalement et, donc, juridiquement un organisme à but non lucratif dûment enregistré selon les lois haïtiennes et québécoises. Celle-ci est, en réalité, fondée en 1995 par M. Emmanuel Herly Petit, un Haïtien de la diaspora installé au Québec et au Canada depuis trois décennies. Évoluant dans le secteur hospitalier de son pays d’accueil que sont le Québec et le Canada, il a eu l’idée de répondre à certains besoins essentiels qui se posent crûment dans son pays d’origine, Haïti, en termes d’intégration sociale des populations défavorisées ou déshéritées. En effet, celles-ci peinent à accéder aux soins de santé primaires.
Il y a lieu de mentionner que cette idée d’Emmanuel Herly Petit de participer activement et, surtout, positivement à l’insertion sociale de ses Concitoyens les plus démunis date réellement de l’époque où il œuvrait d’antan en Haïti en tant que moniteur au sein de la Croix-Rouge. C’est dire que celle-ci est, certes, le fruit d’une mûre et longue réflexion qui émane bien entendu d’un Citoyen sans nul doute mis au parfum des aspirations légitimes de ses Compatriotes. En d’autres termes, elle n’est pas, à proprement parler, le fruit d’une conscience purement spontanée ou d’une subite improvisation.
Dans la pratique courante, l’OUH est, à vrai dire, un organisme d’utilité publique. Elle se veut un ‘‘partenaire’’ stratégique de l’État haïtien dans l’accomplissement de ses missions de souveraineté. D’ailleurs, celles-ci impliquent logiquement et forcément la nécessité voire l’urgence d’apporter à l’ensemble de ses ressortissants la sécurité et le confort dont ils ont naturellement besoin en termes d’accessibilité aux soins de santé primaires.
À cet effet, dans le domaine de gestion des services sociaux et d’administration de la santé publique, l’OUH a manifestement conclu, au mois d’octobre 1997, un accord de partenariat avec l’État haïtien en vue de la redynamisation de divers centres de santé, communément appelés dispensaires, jugés dysfonctionnels ou non-opérationnels. Dans le cadre de ladite convention, l’OUH a littéralement obtenu du Département de la Santé publique de l’Ouest directement rattaché au Ministère de la Santé publique et de la population, la gestion tant administrative que médicale du Centre de santé de Carrefour-Poy. Il sied de souligner que cette structure sanitaire n’était pratiquement plus opérationnelle depuis plusieurs années.
Donc, la fermeture de ce dispensaire faisait logiquement et forcément de cette région située à 50 Km au nord de la capitale Port-au-Prince une véritable poudrière sanitaire. Elle faisait de ce coin du pays un vivier pour l’expansion des pathologies tropicales au cas où celles-ci ne pourraient ou ne sauraient être endiguées en cas d’épidémies ou de diffusion d’agents pathogènes. À ce niveau, la réouverture de ce centre de santé orphelin a en réalité constitué un bénéfice d’ailleurs fort inestimable pour les habitants de cette région dans la mesure où elle assurait ipso facto l’accessibilité aux soins de santé primaires à une population estimée à plus de 200 000 âmes, qui en étaient par conséquent privées.
Aussi cette réouverture constituait-elle un gain appréciable et inestimable dans la mesure où elle ouvrait d’autres perspectives intéressantes aux ressortissants de ce coin du pays en termes d’implication ou de participation à divers programmes pour eux conçus par l’OUH. Parmi les multiples projets, il importe de relever la création d’emploi dans la mesure où des postes d’infirmière ou infirmier sont préalablement ouverts aux habitants de ladite région. D’ailleurs, ceux-ci connaissent mieux que quiconque la ‘‘psychologie’’ des patients vivant dans leur contrée.
Force est de noter que le Centre de santé de Carrefour-Poy, qui englobe en aval la région de Cabaret-Arcahaie et en amont celle de la Côte-des-Arcadins, a bénéficié à maintes reprises des campagnes de vaccination, d’ailleurs organisées par l’État haïtien, entre autres dans le cadre de la lutte contre la poliomyélite vivement recommandée par l’OMS. Pour ce qui est du paludisme, communément connu sous l’appellation de malaria, ce dispensaire a assuré la distribution des médicaments antipaludéens. Aussi a-t-il participé à la distribution des nourritures aux plus démunis dans le cadre d’un programme alimentaire mis sur pied par l’organisme canadien et québécois, dénommé ‘‘Centre canadien d’étude et de coopération internationale’’ (CECI). Tout comme, pourrait-on relever, il a très nettement contribué à la distribution des vêtements, des fournitures scolaires et des jouets à des familles démunies et jeunes enfants déshérités.
Il importe de mentionner que le Centre de santé de Carrefour Poy géré par l’OUH a, effectivement, joui sur le terrain médical de l’apport incommensurable des médecins cubains dans le cadre de la coopération internationale et caribéenne entre Port-au-Prince et La Havane. Aussi ce dispensaire a-t-il bénéficié de la collaboration active et fructueuse des étudiants en médecine et a fortiori futurs médecins du Canada et du Québec. Toutefois, des médecins haïtiens travaillant dans des institutions hospitalières nationales n’ont pas hésité à offrir leurs précieux services et conseils aux patients de cette région. C’est l’exemple des Drs Ernst, gynécologue, Lionel Paul, généraliste, Alix Moïse, généraliste et Roger Segnon, généraliste. Ces professionnels de la santé haïtiens reconnus encadrent souvent en Haïti le travail médical de leurs collègues venant de l’étranger.
Ce qui est parfaitement clair, donc indéniable, l’OUH dans son action quotidienne se définit comme une organisation ‘‘humanitaire’’ dont la mission primordiale consiste à déployer la solidarité sociale et internationale au profit de la République d’Haïti. Depuis mars 2003, celle-ci bénéficie de la qualité spécifique d’ONG lui reconnue administrativement par les autorités publiques et administratives haïtiennes. Dans le cadre de ses activités sociales et humanitaires, elle a su mobiliser tant l’expertise des professionnels de la santé du Canada et du Québec que les ressources hospitalières de cet État d’Amérique du Nord britannique et de sa Province francophone pour les mettre au service du Centre de santé de Carrefour-Poy et autres institutions médicales d’Haïti.
Parmi les professionnels de la santé canadiens de renommée internationale qui ont, certes, participé aussi bien à la conception qu’au succès du projet ‘‘Haïti Santé et Développement’’ piloté par l’OUH, il convient de nommer le Dr Selim Rashed, à la fois pédiatre près l’hôpital Montréal pour enfants et spécialiste des maladies parasitaires tropicales près l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, la Dre Yvette Bony, hématologue près l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, le Dr Serge Raphaël, psychiatre près les hôpitaux Jean-Talon et Marie-Enfant, le Dr Milord du Centre hospitalier et universitaire de Sherbrooke, le Dr Carlos Vanisschott, gynécologue et le Dr André Arcelin, généraliste.
Dans le cadre dudit projet, l’on ne peut passer sous silence les précieux services et conseils du Dr Julio Fernandez. Ce médecin œuvre au sein des Hôpitaux du Sacré-Cœur de Montréal et Jean-Talon dans le domaine spécialisé de l’Orthopédie. Sans oublier le Dr Pierre Ranger. Ce médecin de la Clinique Orthopédique de Laval, détaché aux Hôpitaux du Sacré-Cœur de Montréal et Jean-Talon, apporte toute son expertise au niveau de la conceptualisation des modèles de formation et de remise à niveau des professionnels de la santé en provenance d’Haïti.
Toujours dans ce cadre, un projet médical et sanitaire a été élaboré sous la coordination du Dr Julio Fernandez en vue de répondre efficacement à la problématique orthopédique en Haïti. Celle-ci s’est littéralement aggravée en raison de nombreux traumatismes sévères liés à la circulation automobile. Elle s’est naturellement compliquée avec le grand engouement des Haïtiens pour des motocyclettes négociant l'usage des routes avec les véhicules motorisés dans les agglomérations. Aussi s’est-elle évidemment aggravée en raison de multiples difficultés relatives à la réhabilitation sociale des accidentés de la route.
Pour y répondre, l’OUH compte réellement mettre sur pied une clinique mobile. Cette unité médicale ambulante rattachée à l'Institut haïtien de la réhabilitation [IHR]) aura primordialement pour tâche de dispenser des conseils médicaux et d'administrer des soins de santé de qualité aux patients littéralement handicapés par des difficultés d’ordre orthopédique. Aussi l'OUH compte-t-elle établir une structure médicale pour soigner et, surtout, resocialiser cette catégorie on ne peut plus particulière. Cette unité fixe servira également à former un personnel de qualité, fortement adapté aux besoins de la clientèle orthopédique.
C’est dans cette perspective unique de prestation de services de santé publique qu’un accord a été conclu entre l'OUH et l’Office d’Assurance Accidents de Travail, Maladie et Maternité (OFATMA). C'est dans cet esprit de sécurité sociale (assurance et protection) des Citoyens qu'une convention portant partenariat stratégique a été dûment signée entre l'OUH et ledit organisme étatique chargé de la couverture sociale des salariés de l’espace privé et des agents administratifs du secteur public. Ce qui permettra, ainsi, à l'OFATMA de mieux couvrir socialement la population à travers ses réseaux de services sociaux mais aussi de mieux offrir des soins de santé à tous les patients à travers ses réseaux d'hôpitaux, de cliniques et de dispensaires sur l'ensemble du territoire haïtien.
Qui dit OUH, dit logiquement et forcément programmes sociaux et projets humanitaires mis sur pied en Haïti. Qui dit OUH, dit surtout action humanitaire. Cette action n'est possible qu'avec l'apport des partenaires publics ou privés. Parmi les partenaires de l'OUH, il y a des personnes morales, tout comme des personnes privées. Et parmi les personnes morales qui soutiennent les activités de l'OUH, il y a des hôpitaux et des cliniques du Québec - et surtout de la grande région de Montréal - qui lui fournissent assistance matérielle et ressources humaines.
S'agissant des établissements hospitaliers qui ont généreusement apporté par l’entremise de l’OUH leur contribution au projet Haïti Santé et Développement en termes de ressources humaines, il faut citer les hôpitaux du Sacré-Coeur de Montréal, Jean-Talon et Maisonneuve-Rosemont. Ces Institutions ont daigné associer aux divers déplacements des professionnels de la santé du Canada et du Québec en Haïti des groupes de médecins et d’infirmières. S’agissant effectivement des équipements médicaux et pharmaceutiques, les trois hôpitaux de l’Ile de Montréal, ci-dessus mentionnés, ont toujours été d’un grand secours. Leur apport fort appréciable a toujours permis de doter les hôpitaux d'Haïti de médicaments et de matériels. Les grands bénéficiaires de cette manne médicale sont généralement les institutions hospitalières, les polycliniques et cliniques faisant partie intégrante de la grande ceinture de Port-au-Prince.
Ce qui est clair, l'action sociale et humanitaire de l'OUH est soutenue moralement et même matériellement par bien des professionnels de la santé du Canada et du Québec. Parmi ces personnes dévouées à la cause haïtienne et celle de l'OUH, il y a Madame Chantal Alarie. Cette infirmière en chef du Bloc opératoire de l'Hôpital Jean-Talon s'est toujours montrée généreuse et disponible. Elle fait partie de ce cercle, de ce noyau, qui a toujours cru au bien-fondé du projet Haïti Santé et Développement, ainsi qu'à la pertinence de différents programmes sociaux et humanitaires initiés en Haïti.
Pour ce qui est de la diaspora haïtienne, le Dr Lys Montas utilise fréquemment le réseau de l’OUH en vue d’acheminer des médicaments ophtalmologiques. Ceux-ci sont distribués à certaines institutions hospitalières ou quelques centres de santé actifs en Haïti. Le Dr Rosny Destimé qui a, déjà, œuvré dans l’univers de la santé publique et des services sociaux en Haïti, participe très activement à la distribution des médicaments et des équipements via l’OUH. Aussi participe-t-il à la mise sur pied des campagnes de vaccination et à la formation sur le terrain des infirmières, ainsi que l’encadrement des infirmières-auxiliaires. Quant à elle, la chirurgie est, faut-il le souligner, assurée par le Dr Maxime Séjour.
En Haïti, l’OUH est également partenaire d’un certain nombre d’institutions internationales et nationales. Sur le plan international, elle coopère avec Médecins sans Frontières (MSF), le Centre canadien d’étude et de coopération internationale (CECI), OXFAM-Québec, etc. Ces organismes internationaux ont pignon sur rue à Port-au-Prince. Sur le plan national, l’OUH coopère étroitement avec l’hôpital de Cité Soleil au niveau d’échange d’informations, l’hôpital Général de Port-au-Prince pour la distribution des médicaments et équipements convoyés du Canada et du Québec, ainsi que l’hôpital de Chancerelles pour la distribution des médicaments pharmaceutiques et équipements et l'Hôpital de l'OFATMA situé à la Cité militaire.
Entre autres activités, l’OUH distribue l’eau potable dans la région de Carrefour-Poy et ses environs. Elle participe activement à la diffusion des mesures prophylactiques et à la mise sur pied des campagnes de sensibilisation sur différentes maladies (tuberculose, VIH/Sida, MTS ou maladies transmissibles sexuellement, malaria, tétanos, etc.). Aussi participe-t-elle à la sensibilisation de jeunes femmes enceintes en vue d’assumer des grossesses sans risque. Ce programme est, d’ailleurs, supervisé par David Mathias, Pierre-Michel Aurélien ou Grégory-Pierre Acroques. Toutes ces personnes ci-dessus nommées sont des agents locaux formés par l’OUH.
Par ailleurs, lors du fameux séisme qui a très durement frappé Haïti, violemment touché les populations fragiles, le 12 janvier 2010, l’OUH a bel et bien distribué des fils de suture. Elle a également distribué des médicaments et des pansements en provenance du Québec et du Canada sous la supervision d’Alphonse Apollon et de Nadia Laroche. Aussi l’OUH a-t-elle procédé à des chirurgies mineures.
Joël Asher Lévy-Cohen
Journaliste indépendant