Tradition et Mystique pascale
Interprétations de la fête de Pâques à la lumière du discours religieux
‘‘S’il y avait deux Pâques et deux vendages, il n’y aurait plus ni famine ni pauvreté’’ Dicton français
Par Joël Asher Lévy-Cohen *
La tradition pascale repose intrinsèquement sur deux dimensions mystiques. La première dimension est d’ordre purement climatique ou climatologique. Elle est liée à l’arrivée du Printemps. Cette saison annonciatrice de la chaleur ou de la montée du mercure permet à l’être humain de sortir complètement de son hibernation. Elle lui permet de reprendre avec enthousiasme la routine de ses activités généralement extérieures. Pendant l’hiver, celles-ci ont été au point mort parce que l’humain est assujetti aux conditions et aux rigueurs du climat.
Aussi cette tradition pascale est-elle d’ordre essentiellement astronomique. En effet, la célébration de Pâques se veut, en vérité, la célébration du retour du majestueux Soleil. Celui-ci consacre la longueur des jours sur les nuits. Il ne fait aucun doute que cet astre lumineux joue indéniablement un rôle capital dans la conservation ou perpétuation de l’espèce humaine. En d’autres termes, Pâques symbolise naturellement le retour à la vie. La vie, c’est l’accomplissement du travail en tant que processus de transformation de la matière pour assurer la survie de l’espèce humaine. Cette survie passe inéluctablement par l’exécution des travaux de type agricole.
Il existe, donc, une corrélation entre tradition pascale, célébration du printemps et culte de l’astre solaire qui est par essence un astre lumineux sans lequel aucune vie n’est, à vrai dire, absolument possible dans le monde physique et matériel, dans l’univers à deux dimensions. Aussi existe-t-il une corrélation entre coutumes pascales et travaux agricoles puisque la terre laissée en friches devient cultivable. Ce qui revient à dire rentable pour l’alimentation de l’être humain. En d’autres termes, la terre redevient réellement cette mère nourricière qui procure à l’humain toutes les ressources vitales à sa survie, à son épanouissement en tant qu’être et créature divine.
Toutefois, d’un point de vue purement eschatologique, Pâques est une invitation à soulager les ressources animales et végétales directement destinées à la consommation humaine. C’est une période au cours de laquelle l’humain s’interdit de consommer certains aliments à base aussi bien animale que végétale. En d’autres termes, Pâques se veut effectivement une invite à la modération, à l’apaisement. Elle s’avère, donc, une invite à la conservation de la vie, quelle qu’elle soit. Conservation de la vie lato sensu.
De ce fait, la vie cesse d’être caractérisée par cette lutte permanente entre l’être humain et la matière. Elle cesse réellement d’être réduite au combat permanent entre l’homme et la nature environnante. En d’autres termes, Pâques se veut effectivement une invitation en bonne et due forme à la pacification, donc une invitation à l’harmonisation des relations entre l’homme et son environnement immédiat en tant qu’abri de l’humanité.
Ce qui revient à dire que Pâques présente, au-delà de son fondement spirituel et religieux, une dimension ‘‘écologique’’ indéniable dans la mesure où elle concourt pertinemment à l’équilibre de l’écosystème, fût-il animalier ou végétal. Elle interpelle la conscience humaine sur le danger que représente au plus haut point le gaspillage des ressources vitales. En fait, elle interpelle l’humain sur le manque de respect dû à la reproduction des espèces animales et végétales qui constituent sans conteste pour lui une source de survie et, donc, une source de vie tout court.
Par ailleurs, la deuxième dimension mystique qui entoure, sans nul doute, profondément, la tradition pascale est d’ordre historique. Celle-ci est reliée à la libération du Peuple hébreu demeuré très longtemps captif en Égypte. De ce point de vue, Pâques est la célébration du retour à la liberté en tant que plénitude la vie.
En d’autres termes, Pâques en tant que tradition religieuse et spirituelle est, en réalité, une invitation au détachement de tout ce qui rend journellement l’être humain esclave. C’est une invitation au détachement de tout ce qui avilit et dépersonnalise l’espèce humaine. C’est la rupture à la fois radicale et définitive avec tout qui l’empêche, certes, de s’épanouir correctement et de progresser autant spirituellement et moralement que matériellement et intellectuellement.
Ce qui revient forcément à dire que Pâques symbolise non seulement la reconquête de la liberté humaine en tant que phare de la vie mais aussi et surtout le contrôle effectif et plein de soi pour son propre épanouissement et celui de son entourage. C’est la parfaite maîtrise de sa personne en vue de l’émergence d’un univers pacifique et harmonieux, solidaire et fraternel. En d’autres termes, Pâques se veut la manifestation d’un univers indubitablement guidé par l’Amour universel et la Lumière céleste, manifestement respectueux de la nature et de l’environnement.
Joël Asher Lévy-Cohen
Journaliste indépendant