Quel Gouvernement pour la République démocratique du Congo ?
‘‘Que chacun fasse connaître le genre de gouvernement qui commande son respect et ce sera le premier pas pour l'obtenir.’’ La désobéissance civile - Henry David Thoreau
Par Joël Asher Lévy-Cohen
Un Gouvernement est, par essence, une ‘‘Équipe’’ soudée. Celle-ci a la réputation de travailler, efficacement, sous l’autorité d’un homme-orchestre, sous la supervision d’un chef d’orchestre. Sa charge primordiale consiste, naturellement, à ‘‘mettre en musique’’, à ‘‘mettre en demeure’’ la politique de la Nation. D’ailleurs, cette dernière justifie, à n’en point douter, sa mise en place.
En conséquence, cela signifie que sa mission primordiale se résume à ‘‘satisfaire les aspirations populaires et légitimes sous forme de politiques publiques’’. Celles-ci sont naturellement arrêtées en conseil des ministres et avalisées par la Représentation nationale au sein de l’instance parlementaire. Tout comme elles sont, bien entendu, l’œuvre patentée des Délégués du Peuple au sein de cette Institution politique.
Relativement à la Constitution de la République démocratique du Congo, d’ailleurs, promulguée sous la période de Transition le 18 février 2006, cet homme-orchestre s’avère, bien entendu, le Premier ministre. Ce personnage au plus haut sommet de l’État est, en fait, le chef du Gouvernement. En plus d’être le chef de l’Administration publique.
En réalité, qui dit ‘‘Gouvernement’’, dit forcément, fondamentalement ‘‘Équipe’’. Qui dit ‘‘Équipe’’, dit intrinsèquement ‘‘Esprit’’. Donc, avant d’être une ‘‘Institution’’ de la République ou un ‘‘Organe’’ structurel de l’État, un Gouvernement est, par définition, un ‘‘Esprit’’. Celui-ci est caractérisé par la ‘‘Cohésion’’ de ses membres. C’est-à-dire : l’Osmose ou la Symbiose qui soude, fermente l’Équipe. Celle-ci est moralement, donc mentalement, favorisée par la supervision et la coordination du chef d’orchestre qu’est le Premier ministre.
Toutefois, pour qu’il y ait nécessairement Cohésion au sein du Gouvernement en tant qu’institution, il faut qu’il y ait, impérativement, en amont ‘‘Adhésion’’. Dans le contexte administratif d’un pays, ce mot signifie le fait de partager entièrement les objectifs fixés par le Premier ministre et de contribuer par ses actions sur le terrain à les atteindre pour le bien-être de l’État et de la Nation. À ce niveau, qui dit action, dit logiquement et forcément comportement ou attitude. Ce qui renvoie, ipso facto, à la fameuse notion ou au fameux ‘‘principe d’Éthique de travail’’.
En d’autres termes, sans une véritable Adhésion en amont, il n’y a résolument pas de Cohésion. Ce qui veut dire : la notion d’Esprit qui se profile en aval et qui sous-tend, par conséquent, la constitution du Gouvernement, n’existe absolument point. D’où le sens de la trilogie [Gouvernement = ‘‘Équipe’’ + ‘‘Esprit’’ + ‘‘Éthique’’].
Étant donné que la République démocratique du Congo est, certes, revenue à l’ordre constitutionnel après une crise politique à la fois très longue et très aiguë, laquelle a failli même emporter l’ensemble de ses fondamentaux, il va de soi que cet État sis au cœur de l’Afrique transite par la mise en place d’un véritable Gouvernement de salut public. Et, pourquoi pas, d’unité nationale ! Pour qu’il y ait assurément, à cet égard, ‘‘Cohésion gouvernementale’’, il faut qu’il y ait pratiquement adhésion sans faille des ministres à la vision politique et administrative du Premier ministre. Cette réalité ne peut, moralement et matériellement, se manifester sur le terrain qu’au moyen de la compréhension et de l’interprétation que ces plus hautes autorités de la République ont, à vrai dire, de leurs charges administratives et des objectifs politiques assignés par ledit pacte politique à cette structure gouvernementale.
Dans ce contexte on ne peut plus particulier et singulier, pour réussir une meilleure et véritable cohésion, il va de soi que l’équipe gouvernementale soit inéluctablement ‘‘restreinte’’. En effet, la réduction drastique de sa grosseur ou surcharge pondérale entraînera qu’elle soit plus soudée et même plus solidaire. Cet amincissement de sa taille entraînera surtout qu’elle soit plus efficace et donc plus productive.
Pour marquer une rupture nettement radicale avec l’éléphantiasis gouvernemental[i] essentiellement fondé sur l’éclatement artificiel des structures de l’État, l’explosion des organes ministériels[ii] dans le dessein d’entretenir une élite politique ‘‘vorace’’ et ‘‘contreproductive’’, cette Institution gouvernementale doit comporter tout au moins quinze ministères ou tout au plus vingt départements ministériels. Pas plus. Pas moins. Cette restriction se justifie surtout en cette période de rigueur administrative et politique, en cette ère d’austérité gouvernementale, au cours de laquelle l’État doit nécessairement faire montre d’absolue maîtrise de dépenses budgétaires.
À cet égard, le Gouvernement directement issu du nouvel ordre politique et civil se doit d’être un Gouvernement à la fois de Salut public et d’Union nationale parce que sa mission primordiale consiste à extirper tous les dangers qui guettent de manière permanente la République démocratique du Congo. Celle-ci doit commencer par la méthode de gestion politique et administrative de la chose publique. Ce qui est clair, le mode de gestion politique et administrative jusqu’à présent pratiqué a réellement montré toutes ses limites, toutes ses failles sous les régimes despotiques successifs.
Pour ce faire, le slogan politique et administratif de cet organe chargé d’administrer la Collectivité publique au strict nom du Peuple souverain et au service exclusif de la Nation indépendante doit être en réalité : ‘‘Rigueur’’, ‘‘Austérité’ et ‘‘Responsabilité’’. Sa doctrine gestionnaire ou son idéologie administrative doit reposer sur ce maître mot ou pilier fondamental : ‘‘Efficacité’’ ou ‘‘Productivité’’.
Outre la voie salutaire de la paix et de l’harmonie, de la réconciliation nationale et de la concorde politique, de l’humanisme et de l’universalisme, de la dignité et de la justice sociale, de la démocratie et de la liberté, du développement économique de la Collectivité publique et du progrès social du Citoyen, ce Gouvernement de Salut public ou d’Union nationale doit engager le Peuple de la République démocratique du Congo à abolir immédiatement la ‘‘potence’’. Une telle initiative est, à vrai dire, inéluctable. Ceci constituerait, à coup sûr, un grand pas vers la modernité ambiante.
Tout compte fait, de par son mandat gouvernemental, cette équipe ministérielle doit être essentiellement composée de ‘‘politiques’’ et non point de techniciens. En effet, le pays a recouvré l’ordre constitutionnel qui lui faisait d’ailleurs cruellement défaut pour avoir été bâillonné par un système hautement ‘‘démocraticide’’ et ‘‘liberticide’’, ‘‘toxique’’ pour les droits humains fondamentaux. Comme il est clairement question d’ordre politique et civil s’inscrivant directement dans la normalité républicaine, il va de soi que l’ensemble des animateurs institutionnels de l’État soient plutôt des personnages politiques aguerris.
En effet, ces acteurs politiques auxquels il est fait référence, doivent être d’abord et avant tout des ‘‘élus de la Nation’’. Ceci pour avoir participé réellement, directement, au tout dernier scrutin législatif sur le plan national. Ce qui démontre effectivement le niveau de leur audience politique au sein de la Nation. Cette qualité essentielle est en fait un atout pour le gouvernement parce qu’elle démontre à tout bout de champ que son personnel est recruté au sein de la base populaire en tant que fondement de la démocratie politique et participative, et surtout fondement du pouvoir de l’État.
Ensuite, l’ensemble de ces acteurs gouvernementaux doivent naturellement afficher une ‘‘probité’’ morale sans tâche et inattaquable, une ‘‘intégrité’’ morale à tout point de vue irréprochable. Ce profil permet de répondre très correctement aux exigences du discours politique essentiellement fondé sur l’inversion des valeurs morales ou socioculturelles. Enfin, ces plus hautes autorités de la République démocratique du Congo doivent certes afficher une ‘‘compétence’’ avérée dans les domaines politique, administratif ou professionnel.
Quelques exemples de ministères ou de regroupement de ministères de l’État avec leurs nomenclatures respectives dont la primature peut s’inspirer dans le cadre de la nouvelle législature, eu égard à leurs mandats publics et administratifs respectifs. Cette liste tient également compte de la répartition équitable des tâches entre l’État central et ses Collectivités publiques décentralisées, conformément à l’esprit et la lettre de la Constitution du 18 février 2006.
- Ministères d’État
- Sécurité publique, Administration du Territoire & Décentralisation
- Affaires étrangères, Coopération internationale, Intégration régionale & Commerce extérieur
- Justice, Droits humains & Réformes démocratiques
- Défense nationale & Anciens combattants
- Ministres
- Éducation nationale et Instruction publique,
- Industrie, Innovation technologique, Entreprises & Formation professionnelle
- Environnement, Eaux & Forêts, Agriculture & Pêche
- Économie & Finances, Budget & Plan
- Santé & Hygiène publique, Action humanitaire & Services sociaux
- Développement & Infrastructures (Bâtiments & Travaux publics)
- Énergie, Mines et Hydrocarbures
- Fonction publique, Emploi & Prévoyance sociale
- Transports & Communications, Poste & Télécommunications
- Culture et Patrimoine national (porte-parole du Gouvernement)
- Logement, Habitat & Urbanisme
- Secrétariats d’État
- Population & Identification nationale, Affaires coutumières, Immigration & Citoyenneté
- Tourisme, Arts & Artisanat
- Jeunesse, Sports & Loisirs
- Famille & Solidarité nationale
Joël Asher Lévy-Cohen
Journaliste indépendant